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Cour de Cassation 13 octobre 2020 / Procédure, Annulation, Reprise des investigations sur ces mêmes actes /

Le 29 novembre 2020

" (...)  Faits et procédure

1. Il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure ce qui suit.

2. Une enquête préliminaire a été ouverte par le parquet de Nanterre du chef de violation du secret de l'instruction et du secret professionnel, à la suite de la parution d'un article dans l'édition du Monde datée du 2 septembre 2010 faisant état d'une perquisition réalisée la veille au domicile de Mme D....

3. Les services de l'inspection générale des services de la police nationale (IGPN) ont adressé des réquisitions à divers opérateurs téléphoniques notamment pour identifier les numéros des téléphones portables de MM. P... et M..., journalistes au Monde, ainsi que les numéros des appels entrants et sortants de ces lignes, sur les instructions de M. Q... T..., procureur de la République près le tribunal de grande instance de Nanterre, et de son adjointe, Mme H... J....

4. L'information ensuite ouverte du chef de violation du secret professionnel a été conduite par la juridiction d'instruction de Bordeaux, désignée dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice.

5. Les réquisitions susmentionnées ont été annulées le 5 mai 2011 par la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux, le pourvoi formé contre cet arrêt étant rejeté le 6 décembre 2011.

6. Le 25 février 2011, la société Le Monde, MM. M... et P... ont déposé une plainte avec constitution de partie civile des chefs de collecte de données à caractère personnel par un moyen frauduleux, déloyal ou illicite, et d'atteinte au secret des correspondances par personne dépositaire de l'autorité publique. (...) "

Vu les articles 6-1 et 174 du code de procédure pénale :

16. Il résulte du premier de ces textes que, lorsque les délits dénoncés impliquent la violation de dispositions de procédure pénale, l'action publique ne peut être engagée qu'après la constatation définitive du caractère illégal des actes accomplis.

17. Le second de ces textes interdit de tirer des actes et des pièces ou parties d'actes ou de pièces annulés aucun renseignement contre les parties. Toutefois, une telle interdiction ne s'applique pas à la partie qui, ayant bénéficié de l'annulation d'actes portant atteinte à ses intérêts, s'en prévaut dans le cadre d'une procédure distincte.

18. Enfin, lorsque des investigations ont été annulées en application du premier de ces textes au motif que la plainte avec constitution de partie civile à la suite de laquelle elles ont été effectuées, qui se prévalait de la violation antérieure de dispositions de procédure pénale, avait été déposée avant que le caractère illégal des actes accomplis eût été définitivement constaté, le second de ces textes ne saurait interdire que, sur une plainte identique, réitérée une fois satisfaite cette condition, le juge d'instruction procède à nouveau aux investigations précédemment annulées.

19. Pour prononcer l'annulation de la perquisition diligentée dans les locaux de l'IGPN et de la saisie d'une copie d'archives de la procédure d'enquête préliminaire ouverte du chef de violation du secret de l'instruction le 2 septembre 2010, ainsi que des actes subséquents, l'arrêt relève que cette procédure a été annulée par arrêt du 5 mai 2011 de la chambre de l'instruction de la cour d'appel de Bordeaux et par arrêt du 22 mars 2012 de la 6e chambre de l'instruction de la cour d'appel de Paris.

20. Les juges énoncent qu'il n'était dès lors pas possible d'informer à nouveau sur les réquisitions ordonnées dans le cadre de cette enquête préliminaire qui avaient été annulées.

21. Ils retiennent que la plainte déposée le 2 juillet 2014 par la société éditrice du Monde et par les journalistes précités, identique à celle déposée le 25 février 2011, est intervenue alors que l'arrêt du 22 mars 2012 était définitif.

22. Les juges en déduisent que la perquisition et la saisie d'une copie d'archives dans les locaux de l'IGPN n'ont été que des artifices pour retrouver une copie des pièces annulées par cette décision.

Cour de cassation, criminelle, Chambre criminelle, 13 octobre 2020, 20-80.490

SOURCE : LEGIFRANCE