la contestation par l'entité contrôlée des honoraires du commissaire aux comptes fait obstacle à l'entrée en mission de celui-ci.
La Cour d'Appel de Dijon (arrêt du 18 janvier 2024, n° RG 23/00500, rendu après cassation d'un précédent arrêt) a interprété l'article R823-15 du code de commerce de la façon suivant:
"Selon l’article R 823-15 du code de commerce, dans sa rédaction applicable au litige, pour
les missions de certification des comptes, les honoraires sont librement fixés d’un commun
accord entre le commissaire aux comptes et l’entité contrôlée, préalablement à l’exercice de
la mission".
Pour mémoire l'article évoqué dans sa version en vigueur est rédigé ainsi:
"le montant de la vacation horaire est fixé d'un commun accord entre le ou les commissaires aux comptes et la personne ou l'entité contrôlée, préalablement à l'exercice de la mission". NB Cet article sera abrogé à compter du 1er janvier 2025 aux termes du Décret n° 2023-1394 du 30 décembre 2023.
la jurisprudence établit donc le principe selon lequel les honoraires sont librement fixés d’un commun
accord entre le commissaire aux comptes et l’entité contrôlée, préalablement à l’exercice de
la mission, indépendamment des textes en vigueur qui distinguaient entre taux horaires et volume d'heures nécessaire aux diligences.
Dans le même arrêt, la jurisprudence en tire comme conséquence un autre principe très important pour la profession réglementée des commissaires aux comptes.
En effet, la Cour affirme que:
"En répondant à la contestation par la société "X" du montant total des honoraires sollicités
par la seule référence au barème légal et en affirmant que cette contestation ne pouvait faire
obstacle à son entrée en fonction, la société Haussmann a manqué de loyauté à l’égard de
sa cocontractante en lui fournissant une information inexacte sur les modalités réglementaires
de fixation de ses honoraires".
Cela signifie que la contestation par l'entité contrôlée des honoraires proposées par le commissaire aux comptes est une difficulté qui justifie et fait obstacle à l'entrée en mission du commissaire aux comptes. Il n'y aurait donc pas entrave à la mission du commissaire aux comptes dans cette hypothèse, et la responsabilité du commissaire aux comptes ne saurait donc être engagée du fait qu'il n'engage pas la mission.
Or cette situation peut survenir lorsque qu'un commissaire aux comptes suppléant succède à un commissaire aux comptes titulaire. Il est donc souhaitable que lorsqu'un commissaire aux comptes est nommé en qualité de suppléant, son acte de nomination par l'assemblée générale clarifie immédiatement les termes de son éventuelle lettre de mission et notamment ses honoraires. Cette jurisprudence permet de faire obstacle à l'intervention d'un commissaire aux comptes suppléant devenu titulaire. Cette situation peut également apparaître lorsqu'un commissaire aux comptes est nommé par une assemblée générale sans que la question de ses honoraires et les termes de sa lettre de mission n'ait été clarifiée dans son acte de nomination. Cela peut aussi survenir en cours de mandat du commissaire aux comptes titulaires.
La jurisprudence estime que le commissaire aux comptes commet donc une faute en ne précisant pas suffisamment à l'entité contrôlée que
- ses honoraires sont librement négociés entre lui et l'entité avant son entrée en fonction;
- a défaut le commissaire aux comptes ne peut entrer en fonction.
Il n'y aurait donc pas d'entrave et en contrepartie le commissaire aux comptes n'engage pas sa responsabilité en n'engageant pas la mission.
Cette jurisprudence impacte principalement les difficultés pouvant survenir en cas de succession entre un commissaire aux comptes titulaire et un commissaire aux comptes suppléant.
A titre de précaution, il est sans doute souhaitable pour les commissaires aux comptes d'ajouter un article dans leurs conditions générales rappelant ces principes.
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